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HAITI : "La lutte doit continuer en Haïti pour l’émergence d’un parti politique prenant ses racines dans la classe populaire"

Informations Internationales - 28 février 2014
 

Q : Au vu de la situation et d’après les nouvelles qui nous arrivent (presse, communiqués...), depuis plusieurs mois, la crise s’approfondit en Haïti. Que peux-tu nous dire à ce sujet ?

Le mois de janvier n’a pas été de tout repos dans la vie politique et sociale haïtienne. Au niveau de la politique, le gouvernement n’a pas pu statuer sur une date pour l’organisation des élections. En ce sens, sous l’égide de la Conférence épiscopale d’Haïti, un dialogue a été initié avec diverses organisations de la société civile et politique (...).

La grande majorité de la population n’est pas concernée dans ce prétendu dialogue. Historiquement, ce genre de dialogue fonctionne toujours au détriment du peuple, aucun des partis politiques signataires ne représente vraiment les intérêts du peuple (...).

La situation économique et sociale de la population ne cesse de se détériorer, les prix des produits de première nécessité connaissent des pics extraordinaires, et aucune action concrète n’est entreprise par les responsables pour améliorer la situation de la population. En ce sens, notre position reste inchangée, la lutte doit continuer pour l’émergence d’un parti politique prenant ses racines dans la classe populaire, réunissant les travailleurs, les paysans et tous les secteurs défavorisés de la population, pour la prise du pouvoir et la transformation de leur vie.

Les personnels de l’enseignement étaient en mouvement au mois de janvier pour réclamer de meilleures conditions de travail et l’augmentation du salaire mensuel à 50 000 gourdes par mois. Sous l’égide d’une plate-forme regroupant diverses organisations enseignantes, il y a eu plusieurs jours de grève, ce qui a paralysé le fonctionnement des écoles publiques.

Les élèves de nombreuses écoles sont descendus dans la rue pour exiger le paiement des salaires des enseignants et la reprise des cours.
Le 24 janvier, le gouvernement a trouvé un accord avec la plate-forme des enseignantes et enseignants. Des promesses d’une augmentation salariale d’ici au mois d’avril ont été faites, d’autres avantages sociaux sont aussi inclus dans cet accord. Toutefois, le syndicat enseignant (UNNOH) compte poursuivre la mobilisation jusqu’à l’obtention de la revendication des 50 000 gourdes de salaire mensuel qui a été définie dès le début du mouvement et qui n’a pas été prise en compte dans l’accord entre le gouvernement et la plate-forme.

Ce soulèvement du secteur des enseignants met à nu les mensonges du gouvernement, qui veut faire croire, à grand coup de publicité, à la réussite du programme de la gratuité de l’école primaire. L’accès à une éducation de qualité reste une chimère pour la grande majorité de la population.

Q  : Où en est la situation des travailleurs du textile, après leur mouvement contre la décision du Conseil supérieur des salaires de porter le salaire minimum à 225 gourdes, avec le soutien de certaines organisations syndicales, alors qu’ils réclamaient 500 gourdes, et après la répression dont ils sont l’objet (brutalités policières, licenciement de certains d’entre eux) ?

Effectivement, six ouvriers de l’usine « One World Apparel SA », ont été arbitrairement licenciés, le 8 janvier dernier, par les deux responsables de ces usines, Charles Henry Baker et Andy Apaid. Il s’agit de Jude Pierre, Luckner Louis, Deroy Jean-Baptiste, Paul René Pierre, Jean Luvard Exavier, Rubin Mucial. C’est seulement oralement que ces derniers ont été informés de leur mise à pied. Depuis les mobilisations contre la décision prise par le Conseil supérieur des salaires de fixer, à partir de janvier 2014, le salaire minimum journalier à 225 gourdes, les ouvriers subissent divers types d’actes d’intimidation.

La révocation de ces ouvriers participe de ce même objectif de briser le mouvement.

Toutefois, le mercredi 15 janvier 2014, des dizaines d’ouvriers ont organisé un sit-in devant le ministère des Affaires sociales et du Travail pour dénoncer leur révocation et les mauvais traitements qu’ils subissent dans les usines. Devant cette violation flagrante des droits de ces ouvriers, il revient aux organisations des droits de l’homme et aux organisations populaires d’accompagner ces ouvriers jusqu’à ce que justice leur soit rendue. Et la lutte pour un salaire quotidien minimum de 500 gourdes doit continuer.

Q : Dans moins de quatre mois, le 1er juin prochain, ce sera le dixième anniversaire de l’occupation d’Haïti par les troupes de l’ONU (la Minustah). Le 28 mai, ce sera la fin de l’ultimatum fixé par le Sénat haïtien à travers la résolution adoptée le 28 mai 2013. Où en est-on de la campagne pour le retrait des troupes ?

La lutte pour le retrait des troupes de la Minustah reste un combat permanent pour le secteur populaire haïtien, et elle mérite d’être intensifiée. Lors de sa participation au deuxième sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté des Etats de l’Amérique latine et de la Caraïbe (CELAC), qui s’est tenu à Cuba les 28 et 29 janvier, le président Martelly a clairement exprimé son intention de conduire à son terme le mandat de la Minustah, déclarant qu’il voulait orienter les actions des casques bleus vers le « développement du pays ».

Alors que nous savons pertinemment que les casques bleus n’ont jamais eu l’intention de participer d’une quelconque manière à aucune forme de développement.

Leur installation dans le pays a fait beaucoup de mal à la population du fait de différentes formes de violences physiques et sexuelles qu’ils continuent de perpétrer, et du fait de l’introduction du choléra qui continue de faire de nombreuses victimes. Après le grand rassemblement contre la Minustah qui a été réalisé le 1er juin de l’année 2013, nous comptons organiser différentes actions pour arriver à un autre rassemblement cette année. Nous sommes en train de planifier l’activité en conséquence.

Propos recueillis par Robert Fabert (Alliance des travailleurs et paysans de la Caraïbe)

Publié par la Rédaction le jeudi 6 mars 2014

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