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La zone blanche globale

Racisme à l’emploi à l’encontre des Guadeloupéens
 

En France, les Guadeloupéens, comme tous ceux qui sont nègres ou qui tirent leur origine de cette couleur, nationalité française en poche ou pas, font face avec dignité à de constantes discriminations raciales ; dont les discriminations ayant cours sur le marché du travail.

Ce racisme à l’embauche, études, associations, politiques, médias et victimes s’en font régulièrement l’écho. Comme ils font tout aussi régulièrement état des résultats d’enquêtes d’opinion montrant sa généralisation.

Ici aussi, dans cette société guadeloupéenne à structure ethno capitaliste, les disparités dans l’accès à certains types ou niveaux d’emploi sont prégnantes :

- Novembre 2002, le sous-préfet Thierry LELAY, en guise d’aveu, concédait à France Antilles : « Le sujet est explosif ».

- Mars 2006, lassés de se voir refuser ou jeter par des Entreprises au terme de leur période d’essai, de jeunes diplômés créent un site Internet pour interroger et témoigner de ces cas.

- Novembre 2006, parlant du blanchissement des personnels publics, la sociologue Juliette SMERALDA écrivait : « La politique de substitution de personnel à laquelle la métropole procède de manière de plus en plus systématique est déjà ancienne ».

Il n’y a pas que les Services d’Etat monochromes. Les grandes Entreprises privées et toute la multitude ont aussi mis en place les techniques et les argumentaires pour nous éliminer, non seulement comme par le passé des postes à responsabilité, mais aussi des emplois impliquant plus que des tâches d’exécution. Sans craindre une quelconque réaction de politiques évidemment absents, d’intellectuels pour la quasi-totalité silencieux, de médias muets trop souvent : tous aux ordres.

Après avoir donc été rampant, ce racisme à l’emploi, encouragé par nos renoncements et nos lâchetés, s’affiche et se revendique. Parmi tant d’autres, quatre illustrations par l’exemple :

Mai 2006, Daniel GUILLEN (fondateur du centre de formation "P+ CONSULTANTS", et vice-président du "Crédit Mutuel Caisse de la Jaille" dont la présidente esr Maryse MAYEKO), au titre du PRDF de la Région Guadeloupe dont il a la charge, peut tranquillement retranscrire les propos de ses interlocuteurs, « 50 responsables de « Grandes Entreprises » :

- « Pour les postes d’encadrement ou les postes nécessitant « un haut degré d’expertise », une majorité des entreprises guadeloupéennes fait appel aux cabinets de recrutements. Ces derniers prospectent d’ailleurs la plupart du temps sur la métropole pour ce type de poste. » ;

- « On a un réel problème pour recruter des cadres et des agents de maîtrise »…« Les entreprises sont donc obligées de recruter ailleurs, souvent en métropole » ;

- « À ce manque de main d’œuvre qualifié s’ajoute un problème de comportement que beaucoup de responsables d’entreprises décrivent comme « symptomatique de la Guadeloupe » qui force à embaucher les « moins pires » ;…

- « Les jeunes sont nonchalants et ne viennent, pour la plupart, que gagner leur salaire ».

Ainsi de suite, ad nauseam, sur vingt pages.

Juin 2007, Christian VIVIES, PDG de la « S.A NESMOND » et des S.A.S « PARALLIANCE » et « BOULOGNE MATERIAUX », Président du MEDEF, Président du « Comité Régional ANPE », béké à la fortune assise sur l’esclavage et la domination raciale … peut tranquillement exiger de la Région, du Rectorat et des Centres de formation « d’ajouter à l’enseignement technique un module obligatoire de connaissance des valeurs de l’entreprise et de préparation à l’intégration dans l’entreprise. Les centres qui appliqueront ce dispositif seront labellisés, ce qui permettra aux parents de sélectionner les établissements où ils désirent inscrire leurs enfants et aux entreprises de choisir les centres auxquels elles décideront de s’adresser pour des recherches d’embauche. Faute de la mise en place de ce dispositif, le risque est grand de voir les entrepreneurs aller recruter ailleurs les collaborateurs nécessaires à leur croissance.”
On s’étonne, car n’est ce pas déjà le cas à l’Habitation Plantation Guadeloupe ?

Juillet 2007, Jean-Louis CAZE (Directeur Régional de L’ANPE), pour plaider la création à Jarry par L’ANPE d’une « Maison de l’Entreprise » fonctionnant avant l’heure sur le modèle du privé, avec un personnel trié sur des critères inavouables … soulignent la « Tendance au recrutement « exogène » de la part des employeurs, dû à un manque de confiance dans la M.O (Main d’œuvre) locale, au non respect de la législation du travail » ; tendance qu’ils lient à une prétendue « difficulté de trouver le bon candidat, voir déséquilibre profond entre les profils des DE (demandeurs d’emploi) et les postes proposés. ». D’où leur volonté, aussi obstinée que malsaine, de créer une structure « ANPE » permettant à ces Entreprises d’avoir enfin des interlocuteurs ANPE « appropriés ». Pas trop regardants sur leurs méthodes ?

C’est avec le même naturel, que depuis une dizaine d’années, QUALIDOM (ou DOMCONSULTING, propriété de Gilles de REYNAL, dirigée par Isabel HUBERT) assure pour le compte d’une centaine de Grandes Entreprises privées, d’Administrations ou d’Etablissements publics, la formation de milliers de cadres. L’idée du Manager que cette société inculque aux participants ? « Manager, Dompteur : même combat : Les 9 principes fondamentaux auxquels ne déroge jamais un dompteur de fauves… Un fauve est et reste un fauve (quelle que soit la qualité de la relation établie depuis toujours avec lui)…On ne tourne pas le dos à un fauve ».
Comme les Contremaîtres d’habitation d’avant-hier, promus hier Cadres, les Managers d’aujourd’hui sont donc invités, par image interposée, à manier et à donner du fouet pour mâter et dresser les bêtes sauvages. Que nous n’aurions au fond jamais cessé d’être ?

A tous points de vue, le procédé mis en œuvre, illustré notamment par ces quatre exemples, nous est familier :

Après avoir eu à fonder la Traite Négrière Transatlantique, à justifier notre éviction et notre bannissement de la Famille Humaine, à légitimer notre réduction à l’état juridique de marchandise meuble et à l’état quotidien de bête de somme ; après avoir dû théoriser pour assurer la poursuite sous d’autres formes économique politique et juridique de la domination et de l’exploitation ethno capitaliste … la Barbarie Blanche et Européenne met aujourd’hui en avant :

- La nécessité de nous convertir à l’Entreprise, l’équivalent de la Plantation Habitation. Conversion, là encore, rendue nécessaire par notre méconnaissance de ses Valeurs, auxquelles nous serions étrangers, imperméables. Qu’il faut donc naturellement, en sus des programmes « nationaux » nous inculquer, nous imprégner par voie de modules.

- La nécessité de nous défaire de notre « mentalité » et de notre « comportement » présentés comme autant de tares : Tantôt cette irréductibilité qui nous pousse à faire grève, à refuser la soumission et la docilité tellement attendues. Tantôt cette « nonchalance », ici synonyme de paresse, d’absence d’implication, de manque de motivation au travail.

De fait, avocats et porte-parole doivent nous convaincre du bien-fondé de ce sur critère : « culturel » et « comportemental », en apparence.

Pour légitimer son imposition sélective, ils doivent le présenter comme la conséquence de nos lacunes et de nos travers. Ainsi seulement pourra-t-on nous expliquer ce qui ne relève point de l’ordre naturel des choses.

- Le fait qu’à compétences égales, à diplômes égaux, à qualifications égales, à savoir-faire égaux, nous soyons exclus. Le chômage de longue durée des qualifiés ou surqualifiés, diplômés ou surdiplômés ; alors qu’on fait mine de déplorer l’absence de cadres et agents de maîtrise.

- Le bilan de la « Convention jeunes diplômés » ANPE-MEDEF Guadeloupe : 0 Offre d’Emploi déposée par les Entreprises du MEDEF et 0 Jeune diplômé embauché.

- La sur qualification des dizaines de milliers de salariés guadeloupéens obligés, pour sortir du chômage, pwan sa ki ni. L’augmentation (2004-2005) de 32,3 % des Déclarations Uniques d’Embauche (43 513 à 57 573), sans incidence sur notre chômage.

Cette triple offensive – néolibérale, néocoloniale, négrophobe – suppose, par la mobilisation des appareils traditionnels : La zombification du Guadeloupéen ; sa négation et son anéantissement progressif au nom de la Modernité, de la Mondialisation, de la Globalisation ; sa dilution dans le fantasme d’un Tout Monde, d’une part. La diabolisation des mawon qui contestent cette barbarie - nouvelle régression sociale et humaine ; leur réduction et leur invalidation par une répression féroce ; faute, la rétribution de leur silence, de leur soumission, de leur collaboration, d’autre part.

Ces propos ne constituent donc pas des langchap, des dérapages, ou des provocations. Ils ne relèvent pas plus d’une tendance ou d’une dérive : ils participent tous d’un Discours à visée plus large.

Stigmatiser la jeunesse, vilipender les travailleurs, dénoncer les syndicats non serviles, stipendier le comportement les Guadeloupéens… , autant de plaidoiries, "pro domo" ou par "plaider corps présent", pour institutionnaliser l’instauration d’une Zone Blanche Globale.

Une salle blanche, aseptisée, froide. Apurée de la sombre présence de travailleurs fainéants. Débarrassée des noirs desseins de syndicats destructeurs. Nettoyée des comportements et discours, d’autochtones, étrangers aux socio types dominants ; dans notre cas, non fondés sur l’auto dénigrement ou la haine de soi, l’endoracisme ou la honte ethnique.

Ce processus, œuvre aboutie, déjà intériorisé et avalisé par bien des nôtres, se nourrit aussi de nos silences, de nos lâchetés, de nos renoncements. Mais surtout de notre propre inconséquence :

- Ainsi de l’aveuglement de L’ASSEDIC de Guadeloupe qui participe, peut-être même sans le savoir, du bannissement progressif des guadeloupéens de leur propre marché du travail. En ne finançant que trop des formations n’offrant pas de perspective d’emploi, relevant de surcroît d’autres dispositifs (PRF, Afpa, Greta…) ; et pas assez ou du tout des formations offrant de réels débouchés (total 2007 : 10 formations collectives conventionnées, soit moins de 0,5 % des chômeurs indemnisés). En sur médiatisant – le directeur Eric DORSANT au WTC - la présentation du BMO (Besoins en Main d’Oeuvre des entreprises) ; ici, simple outil de propagande au service d’une politique d’orientation massive des chômeurs vers des métiers « clichés », sur saturés, précaires ou non qualifiés : autant de tunnels vers l’inéluctable chômage de longue durée ; rarement entrecoupés de CDD à mi-temps. En ne contrôlant et en ne poursuivant en masse que les seuls chômeurs ; de préférence les plus démunis.

- Ainsi de la surdité de la majorité politique Régionale. Qui, comme la précédente, n’entend financer que tous les 4 ans un Programme Régional de Formations, au lieu du programme annuel obligatoire ; laissant ainsi les 75% de chômeurs non qualifiés en attente de formation, végéter. Qui n’aura dénoncé ni les conditions de la sous-traitance opérée par le prestataire retenu sur appel d’offres pour l’élaboration du PRDF ; ni le contenu raciste d’un pan entier du document qui lui a été remis. Qui n’établit aucun support permettant aux chômeurs sollicitant une aide à la formation d’en connaître les critères d’éligibilité et les modalités d’attribution ; en toute transparence et égalité. Qui refuse tout partenariat, si ce n’est avec une association lige ; simple relais d’une politique clientéliste. Qui, sans aucune contrepartie, fournit rituellement une main d’œuvre quasi-gratuite aux entreprises. Qui n’élabore aucune clause sociale pour les Marchés publics ou pour les aides à des secteurs sur subventionnés bien que licenciant en masse.

- Ainsi de l’impéritie de la Direction de l’ANPE Guadeloupe, qui n’a su en 15 ans : Analyser les évolutions et s’adapter aux mutations du marché du travail ; en informer et y préparer les chômeurs. Alerter les Pouvoirs publics et sa tutelle sur les conséquences de l’irrésistible remontée de l’emploi informel. Interpeller les mêmes sur l’impossibilité de remplir la mission du fait de la transformation de chaque mairie et élu en officine de recrutement clientéliste. Réclamer aux conseils régional et général la mise en place de partenariats actifs. Penser et proposer des conventions aux socioprofessionnels ayant recours aux services de l’Agence (TPE, jeunes ou nouvelles entreprises et artisans pour l’essentiel). Elaborer, déployer et communiquer une Offre de service pour ses usagers (chômeurs & entreprises) fondée sur les réalités socio-économiques et culturelles de l’archipel. Informer sur son rôle et circonscrire le champ de son action d’intermédiation ; expliquer les limites et les freins à son intervention.

Les trois cent mille guadeloupéens (ceux au chômage, en contrats précaires, vivant des minima sociaux, vivant sous le seuil de pauvreté ; et les artisans en partance ou aux abois, les petits exploitants et agriculteurs aux terres empoisonnées, les petits commerçants empêchés d’appréhender l’avenir, les jeunes…) doivent plaider, eux, pour autre chose : une société libre et égalitaire, débarrassée de l’exploitation capitaliste, affranchie de la domination coloniale, exempte de toutes engeances racistes.

Les dizaines de milliers de guadeloupéens oeuvrant à des titres divers dans divers champs, secteurs ou activités (Enseignement et Formation, Santé, Action Sociale et Socio Educatif, Activités associatives - sportives culturelles éducatives…) pour construire des êtres dignes ou tenter de reconstruire ces corps fragmentés et ces brisures d’âmes des êtres fracassés par cette nouvelle barbarie… doivent, eux, agir pour avorter cette bête immonde au ventre encore fécond.

UGTG - PA P, le 06.09.07

Publié par la Centrale UGTG le mercredi 11 mars 2009

Forum article


  • >La zone blanche globale
    12 mars 2009, par Le Scrutateur



    Site à visiter : Bravo

    Quel torchon !

    Je m’empresse de l’imprimer, et je vais me torcher le cul avec.


    • >La zone blanche globale
      15 mars 2009, par Curtis

      Qui torchon et sa ! si où pas dakô avé sa ou voué maké la fouté malkan si sit en nou !


    • >La zone blanche globale
      16 mars 2009

      Bouc an moin sou pa dakow épi sa, kon dit Domota ou ka couché oubien ou ka kité Gwada. Nou pa bisen moun en péyi en nou ki vlé rétabli l’esclavaj. Ban nou pal la,bat kow aw et asé polué tè gwadloup.