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« Nous le peuple, dans le but de former une union plus parfaite.
Il y a deux cent vingt et un ans, un groupe d’hommes s’est rassemblé dans une salle qui existe toujours de l’autre côté de la rue, et avec ces simples mots, lança l’aventure inouïe de la démocratie américaine.
Agriculteurs et savants, hommes politiques et patriotes qui avaient traversé l’océan pour fuir la tyrannie et les persécutions, donnèrent enfin forme à leur déclaration d’indépendance lors d’une convention qui siégea à Philadelphie jusqu’au printemps 1787.
Ils finirent par signer le document rédigé, non encore achevé. Ce document portait le stigmate du péché originel de l’esclavage, un problème qui divisait les colonies et faillit faire échouer les travaux de la convention jusqu’à ce que les pères fondateurs décident de permettre le trafic des esclaves pendant encore au moins vingt ans, et de laisser aux générations futures le soin de l’achever.
Bien sûr, la réponse à la question de l’esclavage était déjà en germe dans notre constitution, une constitution dont l’idéal de l’égalité des citoyens devant la loi est le cœur, une constitution qui promettait à son peuple la liberté et la justice, et une union qui pouvait et devait être perfectionnée au fil du temps.
Et pourtant des mots sur un parchemin ne suffirent ni à libérer les esclaves de leurs chaînes, ni à donner aux hommes et aux femmes de toute couleur et de toute croyance leurs pleins droits et devoirs de citoyens des Etats-Unis
Il fallait encore que, de génération en génération, les Américains s’engagent -en luttant et protestant, dans la rue et dans les tribunaux, et en menant une guerre civile et une campagne de désobéissance civile, toujours en prenant de grands risques-, pour réduire l’écart entre la promesse de nos idéaux et la réalité de leur temps.
C’est l’une des tâches que nous nous sommes fixées au début de cette campagne -continuer la longue marche de ceux qui nous ont précédé, une marche pour une Amérique plus juste, plus égale, plus libre, plus généreuse et plus prospère.
J’ai choisi de me présenter aux élections présidentielles à ce moment de l’histoire parce que je crois profondément que nous ne pourrons résoudre les problèmes de notre temps que si nous les résolvons ensemble, que nous ne pourrons parfaire l’union que si nous comprenons que nous avons tous une histoire différente mais que nous partageons de mêmes espoirs, que nous ne sommes pas tous pareils et que nous ne venons pas du même endroit mais que nous voulons aller dans la même direction, vers un avenir meilleur pour nos enfants et petits-enfants.
Cette conviction me vient de ma foi inébranlable en la générosité et la dignité du peuple Américain. Elle me vient aussi de ma propre histoire d’Américain. Je suis le fils d’un noir du Kenya et d’une blanche du Kansas. J’ai été élevé par un grand-père qui a survécu à la Dépression et qui s’est engagé dans l’armée de Patton pendant la deuxième Guerre Mondiale, et une grand-mère blanche qui était ouvrière à la chaîne dans une usine de bombardiers quand son mari était en Europe.
J’ai fréquenté les meilleures écoles d’Amérique et vécu dans un des pays les plus pauvres du monde. J’ai épousé une noire américaine qui porte en elle le sang des esclaves et de leurs maîtres, un héritage que nous avons transmis à nos deux chères filles.
J’ai des frères, des sœurs, des nièces, des neveux des oncles et des cousins, de toute race et de toute teinte, dispersés sur trois continents, et tant que je serai en vie, je n’oublierai jamais que mon histoire est inconcevable dans aucun autre pays.
C’est une histoire qui ne fait pas de moi le candidat le plus plausible. Mais c’est une histoire qui a gravé au plus profond de moi l’idée que cette nation est plus que la somme de ses parties, que de plusieurs nous ne faisons qu’un.
Tout au long de cette première année de campagne, envers et contre tous les pronostics, nous avons constaté à quel point les Américains avaient faim de ce message d’unité.
Bien que l’on soit tenté de juger ma candidature sur des critères purement raciaux, nous avons remporté des victoires impressionnantes dans les états les plus blancs du pays. En Caroline du Sud, où flotte encore le drapeau des Confédérés, nous avons construit une coalition puissante entre Afro-Américains et Américains blancs.
Cela ne veut pas dire que l’appartenance raciale n’a joué aucun rôle dans la campagne. A plusieurs reprises au cours de la campagne, des commentateurs m’ont trouvé ou « trop noir » ou « pas assez noir ».
Nous avons vu surgir des tensions raciales dans la semaine qui a précédé les primaires de la Caroline du Sud. Les médias ont épluché chaque résultat partiel, à la recherche de tout indice de polarisation raciale, pas seulement entre noirs et blancs mais aussi entre noirs et bruns.
Et pourtant ce n’est que ces deux dernières semaines que la question raciale est devenue un facteur de division.
D’un côté on a laissé entendre que ma candidature était en quelque sorte un exercice de discrimination positive, basé seulement sur le désir de libéraux [Ndt : gens de gauche].
D’un autre côté on a entendu mon ancien pasteur, le Révérend Jeremiah Wright, exprimer dans un langage incendiaire des opinions qui risquent non seulement de creuser le fossé entre les races mais aussi de porter atteinte à ce qu’il y a de grand et de bon dans notre pays. Voilà qui, à juste titre choque blancs et noirs confondus.
J’ai déjà condamné sans équivoque aucune les déclarations si controversées du Révérend Wright. Il reste des points qui en dérangent encore certains.
Est-ce que je savais qu’il pouvait à l’occasion dénoncer avec violence la politique américaine intérieure et étrangère ? Bien sûr. M’est-il arrivé de l’entendre dire des choses contestables quand j’étais dans son église ? Oui. Est-ce que je partage toutes ses opinions politiques ? Non, bien au contraire ! Tout comme j’en suis sûr beaucoup d’entre vous entendent vos pasteurs, prêtres ou rabbins proférer des opinions que vous êtes loin de partager.
Mais les déclarations à l’origine de ce récent tollé ne relevaient pas seulement de la polémique. Elles n’étaient pas que l’indignation d’un leader spirituel dénonçant les injustices ressenties.
Elles reflétaient plutôt une vue profondément erronée de ce pays -une vue qui voit du racisme blanc partout, une vue qui met l’accent sur ce qui va mal en Amérique plutôt que sur ce qui va bien. Une vue qui voit les racines des conflits du Moyen-Orient essentiellement dans les actions de solides alliés comme Israël, au lieu de les chercher dans les idéologies perverses et haineuses de l’Islam radical.
Le Révérend Jeremiah Wright ne fait pas que se tromper, ses propos sèment la discorde à un moment où nous devons trouver ensemble des solutions à nos énormes problèmes : deux guerres, une menace terroriste, une économie défaillante, une crise chronique du système de santé, un changement climatique aux conséquences désastreuses. Ces problèmes ne sont ni noirs ni blancs, ni hispaniques ni asiatiques mais ce sont des problèmes qui nous concernent tous.
Au vu de mon parcours, de mes choix politiques et des valeurs et idéaux auxquels j’adhère, on dira que je ne suis pas allé assez loin dans ma condamnation. Et d’abord pourquoi m’être associé avec le Révérend Jeremiah Wright, me demandera-t-on ? Pourquoi ne pas avoir changé d’église ?
J’avoue que si tout ce que je savais du Révérend Wright se résumait aux bribes de sermons qui passent en boucle à la télévision et sur YouTube, ou si la Trinity United Church of Christ ressemblait aux caricatures colportées par certains commentateurs, j’aurais réagi de même.
Mais le fait est que ce n’est pas tout ce que je sais de cet homme. L’homme que j’ai rencontré il y a plus de vingt ans est l’homme qui m’a éveillé à ma foi. Un homme pour qui aimer son prochain, prendre soin des malades et venir en aide aux miséreux est un devoir.
Voilà un homme qui a servi dans les marines, qui a étudié et enseigné dans les meilleures universités et séminaires et qui pendant plus de trente ans a été à la tête d’une église, qui en se mettant au service de sa communauté accomplit l’œuvre de Dieu sur terre : loger les sans-abris, assister les nécessiteux, ouvrir des crèches, attribuer des bourses d’études, rendre visite aux prisonniers, réconforter les séropositifs et les malades atteints du sida.
Dans mon livre, Les Rêves de mon père, je décris mes premières impressions de l’église de la Trinity :
« L’assistance se mit à crier, à se lever, à taper des mains, et le vent puissant de son souffle emportait la voix du révérend jusqu’aux chevrons (...). Et dans ces simples notes - espoir ! - j’entendis autre chose. Au pied de cette croix, à l’intérieur des milliers d’églises réparties dans cette ville, je vis l’histoire de noirs ordinaires se fondre avec celles de David et Goliath, de Moïse et Pharaon, des chrétiens jetés dans la fosse aux lions, du champ d’os desséchés d’Ezékiel.
Ces histoires -de survie, de liberté, d’espoir- devenaient notre histoire, mon histoire ; le sang qui avait été versé était notre sang, les larmes étaient nos larmes. Cette église noire, en cette belle journée, était redevenue un navire qui transportait l’histoire d’un peuple jusqu’aux générations futures et jusque dans un monde plus grand.
Nos luttes et nos triomphes devenaient soudain uniques et universels, noirs et plus que noirs. En faisant la chronique de notre voyage, les histoires et les chants nous donnaient un moyen de revendiquer des souvenirs dont nous n’avions pas à avoir honte (...), des souvenirs que tout le monde pouvait étudier et chérir - et avec lesquels nous pouvions commencer à reconstruire. »
Telle a été ma première expérience à Trinity. Comme beaucoup d’églises majoritairement noires, Trinity est un microcosme de la communauté noire : on y voit le médecin et la mère assistée, l’étudiant modèle et le voyou repenti.
Comme toutes les autres églises noires, les services religieux de Trinity résonnent de rires tapageurs et de plaisanteries truculentes. Et ça danse, ça tape des mains, ça crie et ça hurle, ce qui peut paraître incongru à un nouveau venu
L’église contient toute la tendresse et la cruauté, l’intelligence l’extrême et l’ignorance crasse, les combats et les réussites, tout l’amour et, oui, l’amertume et les préjugés qui sont la somme de l’expérience noire en Amérique.
Et cela explique sans doute mes rapports avec le Révérend Wright. Si imparfait soit-il, je le considère comme un membre de ma famille. Il a raffermi ma foi, célébré mon mariage et baptisé mes enfants.
Jamais dans mes conversations avec lui ne l’ai-je entendu parler d’un groupe ethnique en termes péjoratifs, ou manquer de respect ou de courtoisie envers les blancs avec qui il a affaire. Il porte en lui les contradictions - le bon et le mauvais- de la communauté qu’il sert sans se ménager depuis tant d’années.
Je ne peux pas plus le renier que je ne peux renier la communauté noire, je ne peux pas plus le renier que je ne peux renier ma grand-mère blanche, une femme qui a fait tant de sacrifices pour moi, une femme qui m’aime plus que tout au monde, mais aussi une femme qui m’avouait sa peur des noirs qu’elle croisait dans la rue et que, plus d’une fois, j’ai entendu faire des remarques racistes qui m’ont répugné.
Ces personnes sont une partie de moi. Et elles font partie de l’Amérique, ce pays que j’aime.
D’aucuns verront ici une tentative de justifier ou d’excuser des propos tout à fait inexcusables. Je peux vous assurer qu’il n’en est rien. Je suppose qu’il serait plus prudent, politiquement, de continuer comme si de rien n’était, en espérant que toute l’affaire sera vite oubliée.
Nous pourrions faire peu de cas du Révérend Wright, et ne voir en lui qu’un excentrique ou un démagogue, tout comme certains l’ont fait dans le cas de Geraldine Ferraro, l’accusant, à la suite de ses récentes déclarations, de préjugé racial.
Mais je crois que ce pays, aujourd’hui, ne peut pas se permettre d’ignorer la problématique de race. Nous commettrions la même erreur que le Révérend Wright dans ses sermons offensants sur l’Amérique -en simplifiant, en recourant à des stéréotypes et en accentuant les côtés négatifs au point de déformer la réalité.
Le fait est que les propos qui ont été tenus et les problèmes qui ont été soulevés ces dernières semaines reflètent les aspects complexes du problème racial que n’avons jamais vraiment explorés - une partie de notre union qui nous reste encore à parfaire.
Et si nous abandonnons maintenant pour revenir tout simplement à nos positions respectives, nous n’arriverons jamais à nous unir pour surmonter ensemble les défis que sont l’assurance maladie, l’éducation ou la création d’emplois pour chaque Américain.
Pour comprendre cet état de choses, il faut se rappeler comment on en est arrivé là. Comme l’a écrit William Faulkner : « Le passé n’est pas mort et enterré. En fait il n’est même pas passé. » Nul besoin ici de réciter l’histoire des injustices raciales dans ce pays
Mais devons nous rappeler que si tant de disparités existent dans la communauté afro-américaine d’aujourd’hui, c’est qu’elles proviennent en droite ligne des inégalités transmises par la génération précédente qui a souffert de l’héritage brutal de l’esclavage et de Jim Crow.
La ségrégation à l’école a produit et produit encore des écoles inférieures. Cinquante ans après Brown vs. The Board of Education, rien n’a changé et la qualité inférieure de l’éducation que dispensent ces écoles aide à expliquer les écarts de réussite entre les étudiants blancs et noirs d’aujourd’hui.
La légalisation de la discrimination -des noirs qu’on empêchait, souvent par des méthodes violentes, d’accéder a la propriété, des crédits que l’on accordait pas aux entrepreneurs afro-américains, des propriétaires noirs qui n’avaient pas droit aux prêts du FHA [Ndt : Federal Housing Administration, l’administration fédérale en charge du logement], des noirs exclus des syndicats, des forces de police ou des casernes de pompiers, a fait que les familles noires n’ont jamais pu accumuler un capital conséquent à transmettre aux générations futures.
Cette histoire explique l’écart de fortune et de revenus entre noirs et blancs et la concentration des poches de pauvreté qui persistent dans tant de communautés urbaines et rurales d’aujourd’hui.
Le manque de débouchés parmi les noirs, la honte et la frustration de ne pouvoir subvenir aux besoins de sa famille ont contribué a la désintégration des familles noires - un problème que la politique d’aide sociale, pendant des années, a peut-être aggravée. Le manque de service publics de base dans un si grand nombre de quartiers noirs -des aires de jeux pour les enfants, des patrouilles de police, le ramassage régulier des ordures et l’application des codes d’urbanisme, tout cela a crée un cycle de violence, de gâchis et de négligences qui continue de nous hanter.
C’est la réalité dans laquelle le Révérend Wright et d’autres Afro-Américains de sa génération ont grandi. Ils sont devenus adultes à la fin des années 50 et au début des années 60, époque ou la ségrégation était encore en vigueur et les perspectives d’avenir systématiquement réduites.
Ce qui est extraordinaire, ce n’est pas de voir combien ont renoncé devant la discrimination, mais plutôt combien ont réussi à surmonter les obstacles et combien ont su ouvrir la voie à ceux qui, comme moi, allaient les suivre.
Mais pour tous ceux qui ont bataillé dur pour se tailler une part du Rêve Américain, il y en a beaucoup qui n’y sont pas arrivés - ceux qui ont été vaincus, d’une façon ou d’une autre, par la discrimination.
L’expérience de l’échec a été léguée aux générations futures : ces jeunes hommes et, de plus en plus, ces jeunes femmes que l’on voit aux coins des rues ou au fond des prisons, sans espoir ni perspective d’avenir. Même pour les noirs qui s’en sont sortis, les questions de race et de racisme continuent de définir fondamentalement leur vision du monde.
Pour les hommes et les femmes de la génération du Révérend Wright, la mémoire de l’humiliation de la précarité et de la peur n’a pas disparu, pas plus que la colère et l’amertume de ces années.
Cette colère ne s’exprime peut-être pas en public, devant des collègues blancs ou des amis blancs. Mais elle trouve une voix chez le coiffeur ou autour de la table familiale. Parfois cette colère est exploitée par les hommes politiques pour gagner des voix en jouant la carte raciale, ou pour compenser leur propre incompétence.
Et il lui arrive aussi de trouver une voix, le dimanche matin à l’église, du haut de la chaire ou sur les bancs des fidèles. Le fait que tant de gens soient surpris d’entendre cette colère dans certains sermons du Rev. Wright nous rappelle le vieux truisme, à savoir que c’est à l’office du dimanche matin que la ségrégation est la plus évidente.
Cette colère n’est pas toujours une arme efficace. En effet, bien trop souvent, elle nous détourne de nos vrais problèmes, elle nous empêche de confronter notre part de responsabilité dans notre condition, et elle empêche la communauté afro-américaine de nouer les alliances indispensables à un changement véritable.
Mais cette colère est réelle, et elle est puissante, et de souhaiter qu’elle disparaisse, de la condamner sans en comprendre les racines ne sert qu’à creuser le fossé d’incompréhension qui existe entre les deux races.
Et de fait, il existe une colère similaire dans certaines parties de la communauté blanche. La plupart des Américains de la classe ouvrière et de la classe moyenne blanche n’ont pas l’impression d’avoir été spécialement favorisés par leur appartenance raciale.
Leur expérience est l’expérience de l’immigrant -dans leur cas, ils n’ont hérité de personne, ils sont partis de rien. Ils ont travaillé dur toute leur vie, souvent pour voir leurs emplois délocalisés et leurs retraites partir en fumée.
Ils sont inquiets pour leur avenir, ils voient leurs rêves s’évanouir ; à une époque de stagnation des salaires et de concurrence mondiale, les chances de s’en sortir deviennent comme un jeu de somme nulle où vos rêves se réalisent au dépens des miens.
Alors, quand on leur dit que leurs enfants sont affectés à une école à l’autre bout de la ville, quand on leur dit qu’un Afro-Américain qui décroche un bon job ou une place dans une bonne faculté est favorisé à cause d’une injustice qu’ils n’ont pas commise, quand on leur dit que leur peur de la délinquance dans les quartiers est une forme de préjugé, la rancœur s’accumule au fil du temps.
Comme la colère au sein de la communauté noire qui ne s’exprime pas en public, ces choses qui fâchent ne se disent pas non plus. Mais elles affectent le paysage politique depuis au moins une génération.
C’est la colère envers la politique d’assistance de l’Etat-Providence et la politique de discrimination positive qui ont donné naissance à la Coalition Reagan. Les hommes politiques ont systématiquement exploité la peur de l’insécurité à des fins électorales. Les présentateurs des talk-shows et les analystes conservateurs se sont bâti des carrières en débusquant des accusations de racisme bidon, tout en assimilant les débats légitimes sur les injustices et les inégalités raciales à du politiquement correct ou du racisme a rebours.
Tout comme la colère noire s’est souvent avérée contre-productive, la rancœur des blancs nous a aveuglés sur les véritables responsables de l’étranglement de la classe moyenne - une culture d’entreprise où les délits d’initiés, les pratiques comptables douteuses et la course aux gains rapides sont monnaie courante ; une capitale sous l’emprise des lobbies et des groupes de pression, une politique économique au service d’une minorité de privilégiés.
Et pourtant, souhaiter la disparition de cette rancœur des blancs, la qualifier d’inappropriée, voire de raciste, sans reconnaître qu’elle peut avoir des causes légitimes -voila aussi qui contribue à élargir la fracture raciale et faire en sorte que l’on n’arrive pas à se comprendre.
Voilà où nous en sommes actuellement : incapables depuis des années de nous extirper de l’impasse raciale. Contrairement aux dires de certains de mes critiques, blancs ou noirs, je n’ai jamais eu la naïveté de croire que nous pourrions régler nos différends raciaux en l’espace de quatre ans ou avec une seule candidature, qui plus est une candidature aussi imparfaite que la mienne.
Mais j’ai affirmé ma conviction profonde - une conviction ancrée dans ma foi en Dieu et ma foi dans le peuple américain - qu’en travaillant ensemble nous arriverons à panser nos vieilles blessures raciales et qu’en fait nous n’avons plus le choix si nous voulons continuer d’avancer dans la voie d’une union plus parfaite.
Pour la communauté afro-américaine, cela veut dire accepter le fardeau de notre passé sans en devenir les victimes, cela veut dire continuer d’exiger une vraie justice dans tous les aspects de la vie américaine. Mais cela veut aussi dire associer nos propres revendications -meilleure assurance maladie, meilleures écoles, meilleurs emplois-aux aspirations de tous les Américains, qu’il s’agisse de la blanche qui a du mal à briser le plafond de verre dans l’échelle hiérarchique, du blanc qui a été licencié ou de l’immigrant qui s’efforce de nourrir sa famille.
Cela veut dire aussi assumer pleinement nos responsabilités dans la vie - en exigeant davantage de nos pères, en passant plus de temps avec nos enfants, en leur faisant la lecture, en leur apprenant que même s’ils sont en butte aux difficultés et à la discrimination, ils ne doivent jamais succomber au désespoir et au cynisme : ils doivent toujours croire qu’ils peuvent être maîtres de leur destinée.
L’ironie, c’est que cette notion si fondamentalement américaine -et, oui, conservatrice-de l’effort personnel, on la retrouve souvent dans les sermons du Rev. Wright. Mais ce que mon ancien pasteur n’a pas compris, c’est qu’on ne peut pas chercher à s’aider soi-même sans aussi croire que la société peut changer.
L’erreur profonde du Rev. Wright n’est pas d’avoir parlé du racisme dans notre société. C’est d’en avoir parlé comme si rien n’avait changé, comme si nous n’avions pas accompli de progrès, comme si ce pays -un pays ou un noir peut être candidat au poste suprême et construire une coalition de blancs et de noirs, d’hispaniques et d’asiatiques, de riches et de pauvres, de jeunes et de vieux-était encore prisonnier de son passé tragique. Mais ce que nous savons - ce que nous avons vu-c’est que l’Amérique peut changer. C’est là le vrai génie de cette nation. Ce que nous avons déjà accompli nous donne de l’espoir -l’audace d’espérer -pour ce que nous pouvons et devons accomplir demain.
Pour ce qui est de la communauté blanche, la voie vers une union plus parfaite suppose de reconnaître que ce qui fait souffrir la communauté afro-américaine n’est pas le produit de l’imagination des noirs ; que l’héritage de la discrimination -et les épisodes actuels de discrimination, quoique moins manifestes que par le passé- sont bien réels et doivent être combattus.
Non seulement par les mots, mais par les actes -en investissant dans nos écoles et nos communautés ; en faisant respecter les droits civils et en garantissant une justice pénale plus équitable ; en donnant à cette génération les moyens de s’en sortir, ce qui faisait défaut aux générations précédentes.
Il faut que tous les Américains comprennent que vos rêves ne se réalisent pas forcément au détriment des miens ; qu’investir dans la santé, les programmes sociaux et l’éducation des enfants noirs, bruns et blancs contribuera à la prospérité de tous les Américains.
En fin de compte, ce que l’on attend de nous, ce n’est ni plus ni moins ce que toutes les grandes religions du monde exigent -que nous nous conduisions envers les autres comme nous aimerions qu’ils se conduisent envers nous. Soyons le gardien de notre frère, nous disent les Ecritures. Soyons le gardien de notre sœur. Trouvons ensemble cet enjeu commun qui nous soude les uns aux autres, et que notre politique reflète aussi l’esprit de ce projet.
Car nous avons un choix à faire dans ce pays. Nous pouvons accepter une politique qui engendre les divisions intercommunautaires, les conflits et le cynisme. Nous pouvons aborder le problème racial en voyeurs -comme pendant le procès d’O.J. Simpson -, sous un angle tragique - comme nous l’avons fait après Katrina - ou encore comme nourriture pour les journaux télévisés du soir. Nous pouvons exploiter la moindre bavure dans le camp d’Hillary comme preuve qu’elle joue la carte raciale, ou nous pouvons nous demander si les électeurs blancs voteront en masse pour John McCain en novembre, quel que soit son programme politique.
We can do that. [Oui, nous pouvons faire cela.]
Mais dans ce cas, je vous garantis qu’aux prochaines élections nous trouverons un autre sujet de distraction. Et puis un autre. Et puis encore un autre. Et rien ne changera.
C’est une possibilité. Ou bien, maintenant, dans cette campagne, nous pouvons dire ensemble : « Cette fois, non ». Cette fois nous voulons parler des écoles délabrées qui dérobent leur avenir à nos enfants, les enfants noirs, les enfants blancs, les enfants asiatiques, les enfants hispaniques et les enfants amérindiens.
Cette fois nous ne voulons plus du cynisme qui nous répète que ces gosses sont incapables d’apprendre, que ces gosses qui ne nous ressemblent pas sont les problèmes de quelqu’un d’autre. Les enfants de l’Amérique ne sont pas ces gosses-là, mais ces gosses-là sont pourtant bien nos enfants, et nous ne tolérerons pas qu’ils soient laissés pour compte dans la société du vingt-et-unième siècle. Pas cette fois.
Cette fois nous voulons parler des files d’attente aux urgences peuplées de blancs, de noirs et d’hispaniques qui n’ont pas d’assurance santé, qui ne peuvent seuls s’attaquer aux groupes de pression mais qui pourront le faire si nous nous y mettons tous.
Cette fois nous voulons parler des usines qui ont fermé leurs portes et qui ont longtemps fait vivre honnêtement des hommes et des femmes de toute race, nous voulons parler de ces maisons qui sont maintenant à vendre et qui autrefois étaient les foyers d’Américains de toute religion, de toute région et de toute profession.
Cette fois nous voulons parler du fait que le vrai problème n’est pas que quelqu’un qui ne vous ressemble pas puisse vous prendre votre boulot, c’est que l’entreprise pour laquelle vous travaillez va délocaliser dans le seul but de faire du profit.
Cette fois, nous voulons parler des hommes et des femmes de toute couleur et de toute croyance qui servent ensemble, qui combattent ensemble et qui versent ensemble leur sang sous le même fier drapeau. Nous voulons parler du moyen de les ramener à la maison, venant d’une guerre qui n’aurait jamais dû être autorisée et qui n’aurait jamais dû avoir lieu, et nous voulons parler de la façon de montrer notre patriotisme en prenant soin d’eux et de leurs familles et en leur versant les allocations auxquelles ils ont droit.
Je ne me présenterais pas à l’élection présidentielle si je ne croyais pas du fond du cœur que c’est ce que veut l’immense majorité des Américains pour ce pays. Cette union ne sera peut-être jamais parfaite mais, génération après génération, elle a montré qu’elle pouvait se parfaire.
Et aujourd’hui, chaque fois que je me sens sceptique ou cynique quant à cette possibilité, ce qui me redonne le plus d’espoir est la génération à venir -ces jeunes dont les attitudes, les croyances et le sincère désir de changement sont déjà, dans cette élection, rentrés dans l’Histoire.
Il y a une histoire que j’aimerais partager avec vous aujourd’hui, une histoire que j’ai eu l’honneur de raconter lors de la commémoration de la naissance de Martin Luther King, dans sa paroisse, Ebenezer Baptist, à Atlanta.
Il y a une jeune blanche de 23 ans, du nom d’Ashley Baia, qui travaillait pour notre campagne à Florence, en Caroline du Sud. Depuis le début, elle a été chargée de mobiliser une communauté à majorité afro-américaine. Et un jour elle s’est trouvée à une table ronde où chacun, tour à tour, racontait son histoire et disait pourquoi il était là.
Et Ashley a dit que quand elle avait 9 ans sa maman a eu un cancer, et parce qu’elle avait manqué plusieurs jours de travail elle a été licenciée et a perdu son assurance maladie. Elle a dû se mettre en faillite personnelle et c’est là qu’Ashley s’est décidée à faire quelque chose pour aider sa maman.
Elle savait que ce qui coûtait le plus cher c’était d’acheter à manger, et donc Ashley a convaincu sa mère ce qu’elle aimait par-dessus tout, c’était des sandwichs moutarde-cornichons. Parce que c’était ce qu’il y avait de moins cher.
C’est ce qu’elle a mangé pendant un an, jusqu’à ce que sa maman aille mieux. Et elle a dit à tout le monde, à la table ronde, qu’elle s’était engagée dans la campagne pour aider les milliers d’autres enfants du pays qui eux aussi veulent et doivent aider leurs parents.
Ashley aurait pu agir différemment. Quelqu’un lui a peut être dit a un moment donné que la cause des ennuis de sa mère c’était soit les noirs qui, trop paresseux pour travailler, vivaient des allocations sociales, soit les hispaniques qui entraient clandestinement dans le pays. Mais ce n’est pas ce qu’elle a fait. Elle a cherché des alliés avec qui combattre l’injustice.
Bref, Ashley termine son histoire et demande a chacun pourquoi il s’est engagé dans la campagne. Ils ont tous des histoires et des raisons différentes. Il y en a beaucoup qui soulèvent un problème précis. Et pour finir, c’est le tour de ce vieillard noir qui n’a encore rien dit.
Et Ashley lui demande pourquoi il est là. Il ne soulève aucun point en particulier. Il ne parle ni de l’assurance maladie ni de l’économie. Il ne parle ni d’éducation ni de guerre. Il ne dit pas qu’il est venu à cause de Barack Obama. Il dit simplement : « Je suis ici à cause d’Ashley. »
« Je suis ici à cause d’Ashley ». A lui seul, ce déclic entre la jeune fille blanche et le vieillard noir ne suffit pas. Il ne suffit pas pour donner une assurance santé aux malades, du travail à ceux qui n’en n’ont pas et une éducation à nos enfants.
Mais c’est par là que nous démarrons. Par là que notre union se renforce. Et comme tant de générations l’ont compris tout au long des deux cent vingt et une années écoulées depuis que des patriotes ont signé ce document a Philadelphie, c’est par là que commence le travail de perfection. » candides d’acheter à bon marché la réconciliation raciale.
« A More Perfect Union »
Remarks of Senator Barack Obama
Constitution Center
Tuesday, March 18th, 2008
Philadelphia, Pennsylvania
As Prepared for Delivery
We the people, in order to form a more perfect union.
Two hundred and twenty one years ago, in a hall that still stands across the street, a group of men gathered and, with these simple words, launched America’s improbable experiment in democracy. Farmers and scholars ; statesmen and patriots who had traveled across an ocean to escape tyranny and persecution finally made real their declaration of independence at a Philadelphia convention that lasted through the spring of 1787.
The document they produced was eventually signed but ultimately unfinished. It was stained by this nation’s original sin of slavery, a question that divided the colonies and brought the convention to a stalemate until the founders chose to allow the slave trade to continue for at least twenty more years, and to leave any final resolution to future generations.
Of course, the answer to the slavery question was already embedded within our Constitution - a Constitution that had at its very core the ideal of equal citizenship under the law ; a Constitution that promised its people liberty, and justice, and a union that could be and should be perfected over time.
And yet words on a parchment would not be enough to deliver slaves from bondage, or provide men and women of every color and creed their full rights and obligations as citizens of the United States. What would be needed were Americans in successive generations who were willing to do their part - through protests and struggle, on the streets and in the courts, through a civil war and civil disobedience and always at great risk - to narrow that gap between the promise of our ideals and the reality of their time.
This was one of the tasks we set forth at the beginning of this campaign - to continue the long march of those who came before us, a march for a more just, more equal, more free, more caring and more prosperous America. I chose to run for the presidency at this moment in history because I believe deeply that we cannot solve the challenges of our time unless we solve them together - unless we perfect our union by understanding that we may have different stories, but we hold common hopes ; that we may not look the same and we may not have come from the same place, but we all want to move in the same direction - towards a better future for our children and our grandchildren.
This belief comes from my unyielding faith in the decency and generosity of the American people. But it also comes from my own American story.
I am the son of a black man from Kenya and a white woman from Kansas. I was raised with the help of a white grandfather who survived a Depression to serve in Patton’s Army during World War II and a white grandmother who worked on a bomber assembly line at Fort Leavenworth while he was overseas. I’ve gone to some of the best schools in America and lived in one of the world’s poorest nations. I am married to a black American who carries within her the blood of slaves and slaveowners - an inheritance we pass on to our two precious daughters. I have brothers, sisters, nieces, nephews, uncles and cousins, of every race and every hue, scattered across three continents, and for as long as I live, I will never forget that in no other country on Earth is my story even possible.
It’s a story that hasn’t made me the most conventional candidate. But it is a story that has seared into my genetic makeup the idea that this nation is more than the sum of its parts - that out of many, we are truly one.
Throughout the first year of this campaign, against all predictions to the contrary, we saw how hungry the American people were for this message of unity. Despite the temptation to view my candidacy through a purely racial lens, we won commanding victories in states with some of the whitest populations in the country. In South Carolina, where the Confederate Flag still flies, we built a powerful coalition of African Americans and white Americans.
This is not to say that race has not been an issue in the campaign. At various stages in the campaign, some commentators have deemed me either "too black" or "not black enough." We saw racial tensions bubble to the surface during the week before the South Carolina primary. The press has scoured every exit poll for the latest evidence of racial polarization, not just in terms of white and black, but black and brown as well.
And yet, it has only been in the last couple of weeks that the discussion of race in this campaign has taken a particularly divisive turn.
On one end of the spectrum, we’ve heard the implication that my candidacy is somehow an exercise in affirmative action ; that it’s based solely on the desire of wide-eyed liberals to purchase racial reconciliation on the cheap. On the other end, we’ve heard my former pastor, Reverend Jeremiah Wright, use incendiary language to express views that have the potential not only to widen the racial divide, but views that denigrate both the greatness and the goodness of our nation ; that rightly offend white and black alike.
I have already condemned, in unequivocal terms, the statements of Reverend Wright that have caused such controversy. For some, nagging questions remain. Did I know him to be an occasionally fierce critic of American domestic and foreign policy ? Of course. Did I ever hear him make remarks that could be considered controversial while I sat in church ? Yes. Did I strongly disagree with many of his political views ? Absolutely - just as I’m sure many of you have heard remarks from your pastors, priests, or rabbis with which you strongly disagreed.
But the remarks that have caused this recent firestorm weren’t simply controversial. They weren’t simply a religious leader’s effort to speak out against perceived injustice. Instead, they expressed a profoundly distorted view of this country - a view that sees white racism as endemic, and that elevates what is wrong with America above all that we know is right with America ; a view that sees the conflicts in the Middle East as rooted primarily in the actions of stalwart allies like Israel, instead of emanating from the perverse and hateful ideologies of radical Islam.
As such, Reverend Wright’s comments were not only wrong but divisive, divisive at a time when we need unity ; racially charged at a time when we need to come together to solve a set of monumental problems - two wars, a terrorist threat, a falling economy, a chronic health care crisis and potentially devastating climate change ; problems that are neither black or white or Latino or Asian, but rather problems that confront us all.
Given my background, my politics, and my professed values and ideals, there will no doubt be those for whom my statements of condemnation are not enough. Why associate myself with Reverend Wright in the first place, they may ask ? Why not join another church ? And I confess that if all that I knew of Reverend Wright were the snippets of those sermons that have run in an endless loop on the television and You Tube, or if Trinity United Church of Christ conformed to the caricatures being peddled by some commentators, there is no doubt that I would react in much the same way
But the truth is, that isn’t all that I know of the man. The man I met more than twenty years ago is a man who helped introduce me to my Christian faith, a man who spoke to me about our obligations to love one another ; to care for the sick and lift up the poor. He is a man who served his country as a U.S. Marine ; who has studied and lectured at some of the finest universities and seminaries in the country, and who for over thirty years led a church that serves the community by doing God’s work here on Earth - by housing the homeless, ministering to the needy, providing day care services and scholarships and prison ministries, and reaching out to those suffering from HIV/AIDS.
In my first book, Dreams From My Father, I described the experience of my first service at Trinity :
"People began to shout, to rise from their seats and clap and cry out, a forceful wind carrying the reverend’s voice up into the rafters....And in that single note - hope ! - I heard something else ; at the foot of that cross, inside the thousands of churches across the city, I imagined the stories of ordinary black people merging with the stories of David and Goliath, Moses and Pharaoh, the Christians in the lion’s den, Ezekiel’s field of dry bones. Those stories - of survival, and freedom, and hope - became our story, my story ; the blood that had spilled was our blood, the tears our tears ; until this black church, on this bright day, seemed once more a vessel carrying the story of a people into future generations and into a larger world. Our trials and triumphs became at once unique and universal, black and more than black ; in chronicling our journey, the stories and songs gave us a means to reclaim memories that we didn’t need to feel shame about...memories that all people might study and cherish - and with which we could start to rebuild."
That has been my experience at Trinity. Like other predominantly black churches across the country, Trinity embodies the black community in its entirety - the doctor and the welfare mom, the model student and the former gang-banger. Like other black churches, Trinity’s services are full of raucous laughter and sometimes bawdy humor. They are full of dancing, clapping, screaming and shouting that may seem jarring to the untrained ear. The church contains in full the kindness and cruelty, the fierce intelligence and the shocking ignorance, the struggles and successes, the love and yes, the bitterness and bias that make up the black experience in America.
And this helps explain, perhaps, my relationship with Reverend Wright. As imperfect as he may be, he has been like family to me. He strengthened my faith, officiated my wedding, and baptized my children. Not once in my conversations with him have I heard him talk about any ethnic group in derogatory terms, or treat whites with whom he interacted with anything but courtesy and respect. He contains within him the contradictions - the good and the bad - of the community that he has served diligently for so many years.
I can no more disown him than I can disown the black community. I can no more disown him than I can my white grandmother - a woman who helped raise me, a woman who sacrificed again and again for me, a woman who loves me as much as she loves anything in this world, but a woman who once confessed her fear of black men who passed by her on the street, and who on more than one occasion has uttered racial or ethnic stereotypes that made me cringe.
These people are a part of me. And they are a part of America, this country that I love.
Some will see this as an attempt to justify or excuse comments that are simply inexcusable. I can assure you it is not. I suppose the politically safe thing would be to move on from this episode and just hope that it fades into the woodwork. We can dismiss Reverend Wright as a crank or a demagogue, just as some have dismissed Geraldine Ferraro, in the aftermath of her recent statements, as harboring some deep-seated racial bias.
But race is an issue that I believe this nation cannot afford to ignore right now. We would be making the same mistake that Reverend Wright made in his offending sermons about America - to simplify and stereotype and amplify the negative to the point that it distorts reality.
The fact is that the comments that have been made and the issues that have surfaced over the last few weeks reflect the complexities of race in this country that we’ve never really worked through - a part of our union that we have yet to perfect. And if we walk away now, if we simply retreat into our respective corners, we will never be able to come together and solve challenges like health care, or education, or the need to find good jobs for every American.
Understanding this reality requires a reminder of how we arrived at this point. As William Faulkner once wrote, "The past isn’t dead and buried. In fact, it isn’t even past." We do not need to recite here the history of racial injustice in this country. But we do need to remind ourselves that so many of the disparities that exist in the African-American community today can be directly traced to inequalities passed on from an earlier generation that suffered under the brutal legacy of slavery and Jim Crow.
Segregated schools were, and are, inferior schools ; we still haven’t fixed them, fifty years after Brown v. Board of Education, and the inferior education they provided, then and now, helps explain the pervasive achievement gap between today’s black and white students.
Legalized discrimination - where blacks were prevented, often through violence, from owning property, or loans were not granted to African-American business owners, or black homeowners could not access FHA mortgages, or blacks were excluded from unions, or the police force, or fire departments - meant that black families could not amass any meaningful wealth to bequeath to future generations. That history helps explain the wealth and income gap between black and white, and the concentrated pockets of poverty that persists in so many of today’s urban and rural communities.
A lack of economic opportunity among black men, and the shame and frustration that came from not being able to provide for one’s family, contributed to the erosion of black families - a problem that welfare policies for many years may have worsened. And the lack of basic services in so many urban black neighbourhoods - parks for kids to play in, police walking the beat, regular garbage pick-up and building code enforcement - all helped create a cycle of violence, blight and neglect that continue to haunt us.
This is the reality in which Reverend Wright and other African-Americans of his generation grew up. They came of age in the late fifties and early sixties, a time when segregation was still the law of the land and opportunity was systematically constricted. What’s remarkable is not how many failed in the face of discrimination, but rather how many men and women overcame the odds ; how many were able to make a way out of no way for those like me who would come after them.
But for all those who scratched and clawed their way to get a piece of the American Dream, there were many who didn’t make it - those who were ultimately defeated, in one way or another, by discrimination. That legacy of defeat was passed on to future generations - those young men and increasingly young women who we see standing on street corners or languishing in our prisons, without hope or prospects for the future. Even for those blacks who did make it, questions of race, and racism, continue to define their worldview in fundamental ways. For the men and women of Reverend Wright’s generation, the memories of humiliation and doubt and fear have not gone away ; nor has the anger and the bitterness of those years. That anger may not get expressed in public, in front of white co-workers or white friends. But it does find voice in the barbershop or around the kitchen table. At times, that anger is exploited by politicians, to gin up votes along racial lines, or to make up for a politician’s own failings.
And occasionally it finds voice in the church on Sunday morning, in the pulpit and in the pews. The fact that so many people are surprised to hear that anger in some of Reverend Wright’s sermons simply reminds us of the old truism that the most segregated hour in American life occurs on Sunday morning. That anger is not always productive ; indeed, all too often it distracts attention from solving real problems ; it keeps us from squarely facing our own complicity in our condition, and prevents the African-American community from forging the alliances it needs to bring about real change. But the anger is real ; it is powerful ; and to simply wish it away, to condemn it without understanding its roots, only serves to widen the chasm of misunderstanding that exists between the races.
In fact, a similar anger exists within segments of the white community. Most working- and middle-class white Americans don’t feel that they have been particularly privileged by their race. Their experience is the immigrant experience - as far as they’re concerned, no one’s handed them anything, they’ve built it from scratch. They’ve worked hard all their lives, many times only to see their jobs shipped overseas or their pension dumped after a lifetime of labor. They are anxious about their futures, and feel their dreams slipping away ; in an era of stagnant wages and global competition, opportunity comes to be seen as a zero sum game, in which your dreams come at my expense. So when they are told to bus their children to a school across town ; when they hear that an African American is getting an advantage in landing a good job or a spot in a good college because of an injustice that they themselves never committed ; when they’re told that their fears about crime in urban neighborhoods are somehow prejudiced, resentment builds over time.
Like the anger within the black community, these resentments aren’t always expressed in polite company. But they have helped shape the political landscape for at least a generation. Anger over welfare and affirmative action helped forge the Reagan Coalition. Politicians routinely exploited fears of crime for their own electoral ends. Talk show hosts and conservative commentators built entire careers unmasking bogus claims of racism while dismissing legitimate discussions of racial injustice and inequality as mere political correctness or reverse racism.
Just as black anger often proved counterproductive, so have these white resentments distracted attention from the real culprits of the middle class squeeze - a corporate culture rife with inside dealing, questionable accounting practices, and short-term greed ; a Washington dominated by lobbyists and special interests ; economic policies that favor the few over the many. And yet, to wish away the resentments of white Americans, to label them as misguided or even racist, without recognizing they are grounded in legitimate concerns - this too widens the racial divide, and blocks the path to understanding.
This is where we are right now. It’s a racial stalemate we’ve been stuck in for years. Contrary to the claims of some of my critics, black and white, I have never been so naïve as to believe that we can get beyond our racial divisions in a single election cycle, or with a single candidacy - particularly a candidacy as imperfect as my own.
But I have asserted a firm conviction - a conviction rooted in my faith in God and my faith in the American people - that working together we can move beyond some of our old racial wounds, and that in fact we have no choice if we are to continue on the path of a more perfect union.
For the African-American community, that path means embracing the burdens of our past without becoming victims of our past. It means continuing to insist on a full measure of justice in every aspect of American life. But it also means binding our particular grievances - for better health care, and better schools, and better jobs - to the larger aspirations of all Americans — the white woman struggling to break the glass ceiling, the white man who’s been laid off, the immigrant trying to feed his family. And it means taking full responsibility for own lives - by demanding more from our fathers, and spending more time with our children, and reading to them, and teaching them that while they may face challenges and discrimination in their own lives, they must never succumb to despair or cynicism ; they must always believe that they can write their own destiny.
Ironically, this quintessentially American - and yes, conservative - notion of self-help found frequent expression in Reverend Wright’s sermons. But what my former pastor too often failed to understand is that embarking on a program of self-help also requires a belief that society can change.
The profound mistake of Reverend Wright’s sermons is not that he spoke about racism in our society. It’s that he spoke as if our society was static ; as if no progress has been made ; as if this country - a country that has made it possible for one of his own members to run for the highest office in the land and build a coalition of white and black ; Latino and Asian, rich and poor, young and old — is still irrevocably bound to a tragic past. But what we know — what we have seen - is that America can change. That is true genius of this nation. What we have already achieved gives us hope - the audacity to hope - for what we can and must achieve tomorrow.
In the white community, the path to a more perfect union means acknowledging that what ails the African-American community does not just exist in the minds of black people ; that the legacy of discrimination - and current incidents of discrimination, while less overt than in the past - are real and must be addressed. Not just with words, but with deeds - by investing in our schools and our communities ; by enforcing our civil rights laws and ensuring fairness in our criminal justice system ; by providing this generation with ladders of opportunity that were unavailable for previous generations. It requires all Americans to realize that your dreams do not have to come at the expense of my dreams ; that investing in the health, welfare, and education of black and brown and white children will ultimately help all of America prosper.
In the end, then, what is called for is nothing more, and nothing less, than what all the world’s great religions demand - that we do unto others as we would have them do unto us. Let us be our brother’s keeper, Scripture tells us. Let us be our sister’s keeper. Let us find that common stake we all have in one another, and let our politics reflect that spirit as well.
For we have a choice in this country. We can accept a politics that breeds division, and conflict, and cynicism. We can tackle race only as spectacle - as we did in the OJ trial - or in the wake of tragedy, as we did in the aftermath of Katrina - or as fodder for the nightly news. We can play Reverend Wright’s sermons on every channel, every day and talk about them from now until the election, and make the only question in this campaign whether or not the American people think that I somehow believe or sympathize with his most offensive words. We can pounce on some gaffe by a Hillary supporter as evidence that she’s playing the race card, or we can speculate on whether white men will all flock to John McCain in the general election regardless of his policies.
We can do that.
But if we do, I can tell you that in the next election, we’ll be talking about some other distraction. And then another one. And then another one. And nothing will change.
That is one option. Or, at this moment, in this election, we can come together and say, "Not this time." This time we want to talk about the crumbling schools that are stealing the future of black children and white children and Asian children and Hispanic children and Native American children. This time we want to reject the cynicism that tells us that these kids can’t learn ; that those kids who don’t look like us are somebody else’s problem. The children of America are not those kids, they are our kids, and we will not let them fall behind in a 21st century economy. Not this time.
This time we want to talk about how the lines in the Emergency Room are filled with whites and blacks and Hispanics who do not have health care ; who don’t have the power on their own to overcome the special interests in Washington, but who can take them on if we do it together.
This time we want to talk about the shuttered mills that once provided a decent life for men and women of every race, and the homes for sale that once belonged to Americans from every religion, every region, every walk of life. This time we want to talk about the fact that the real problem is not that someone who doesn’t look like you might take your job ; it’s that the corporation you work for will ship it overseas for nothing more than a profit.
This time we want to talk about the men and women of every color and creed who serve together, and fight together, and bleed together under the same proud flag. We want to talk about how to bring them home from a war that never should’ve been authorized and never should’ve been waged, and we want to talk about how we’ll show our patriotism by caring for them, and their families, and giving them the benefits they have earned.
I would not be running for President if I didn’t believe with all my heart that this is what the vast majority of Americans want for this country. This union may never be perfect, but generation after generation has shown that it can always be perfected. And today, whenever I find myself feeling doubtful or cynical about this possibility, what gives me the most hope is the next generation - the young people whose attitudes and beliefs and openness to change have already made history in this election.
There is one story in particularly that I’d like to leave you with today - a story I told when I had the great honor of speaking on Dr. King’s birthday at his home church, Ebenezer Baptist, in Atlanta.
There is a young, twenty-three year old white woman named Ashley Baia who organized for our campaign in Florence, South Carolina. She had been working to organize a mostly African-American community since the beginning of this campaign, and one day she was at a roundtable discussion where everyone went around telling their story and why they were there.
And Ashley said that when she was nine years old, her mother got cancer. And because she had to miss days of work, she was let go and lost her health care. They had to file for bankruptcy, and that’s when Ashley decided that she had to do something to help her mom.
She knew that food was one of their most expensive costs, and so Ashley convinced her mother that what she really liked and really wanted to eat more than anything else was mustard and relish sandwiches. Because that was the cheapest way to eat.
She did this for a year until her mom got better, and she told everyone at the roundtable that the reason she joined our campaign was so that she could help the millions of other children in the country who want and need to help their parents too.
Now Ashley might have made a different choice. Perhaps somebody told her along the way that the source of her mother’s problems were blacks who were on welfare and too lazy to work, or Hispanics who were coming into the country illegally. But she didn’t. She sought out allies in her fight against injustice.
Anyway, Ashley finishes her story and then goes around the room and asks everyone else why they’re supporting the campaign. They all have different stories and reasons. Many bring up a specific issue. And finally they come to this elderly black man who’s been sitting there quietly the entire time. And Ashley asks him why he’s there. And he does not bring up a specific issue. He does not say health care or the economy. He does not say education or the war. He does not say that he was there because of Barack Obama. He simply says to everyone in the room, "I am here because of Ashley."
"I’m here because of Ashley." By itself, that single moment of recognition between that young white girl and that old black man is not enough. It is not enough to give health care to the sick, or jobs to the jobless, or education to our children.
But it is where we start. It is where our union grows stronger. And as so many generations have come to realize over the course of the two-hundred and twenty one years since a band of patriots signed that document in Philadelphia, that is where the perfection begins.