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Jean-Marie Nomertin, secrétaire de la CGTG et membre du Liyannaj Kont Pwofitasyon, détaille la stratégie de l’organisation face à la crise mondiale. « Nous allons travailler dans toutes les directions », annonce-t-il.
Qu’a retenu le peuple guadeloupéen de cette grève ?
Jean-Marie Nomertin. Pendant la grève, les Guadeloupéens étaient déjà fiers du mouvement que leur pays avait mis en marche. Maintenant, ce sentiment s’est conforté. Le peuple est encore plus fier. Il cherche à discuter, salut et veut prendre des photos avec le LKP qui lui a ouvert les yeux. Les Guadeloupéens sont fiers de ce combat. Au quotidien, on voit le développement de la solidarité. Celle-ci existait déjà, mais avait tendance à disparaître. L’entraide et la volonté de produire localement, pour satisfaire les besoins élémentaires, sont aussi de la partie depuis cette grève. Maintenant qu’elle est suspendue, ce n’est pas pour autant que ces caractéristiques retrouvées par le peuple ont disparu. On les retrouve sur le plan alimentaire, mais aussi sur le plan de la culture. À la CGTG, tout comme au LKP, nous sommes toujours dans le mouvement du 20 janvier, avec la détermination affichée de lutter contre l’exploitation capitaliste et la pwofitasyon.
Il semble que les gens se plaignent d’une augmentation des prix depuis la fin de la grève ?
Jean-Marie Nomertin. Les commerces qui n’avaient pas renouvelé leurs stocks ont été pris au piège. Ils vendent plus cher parce que leurs fournisseurs ont augmenté les prix. Il faut savoir que durant quarante-quatre jours le port était bloqué. Cela a raréfié les produits sur le marché. Mais dans les jours qui viennent, nous allons voir comment cela se passe, maintenant que le port est à nouveau libre. Que les conteneurs de produits arrivent. Mais l’important, c’est que l’on arrive à ce que la production locale soit valorisée, et qu’il y ait une politique en ce sens. Le LKP a mené le combat pour faire baisser le prix des marchandises entrantes, c’est pour que la production locale soit moins chère. C’est à ce travail que nous allons nous atteler pour les mois et les années qui viennent.
Qu’en est-il de la responsabilité de la grève sur les pertes d’emplois et les licenciements dans les entreprises ?
Jean-Marie Nomertin. Les patrons ont joué au bras de fer avec nous. Ils ont perdu. C’est vrai que le tissu social de la Guadeloupe était déjà chancelant depuis longtemps. Les gros vont rester, et beaucoup de petits vont disparaître. Mais nous avons vu tout de même - et nous avons surtout imposé - que, dans le cadre de la plate-forme du LKP, les petites entreprises aient accès au crédit. Qu’elles puissent se développer réellement. Cela dit, il y a une crise économique mondiale. Il y a des suppressions d’emplois en masse partout dans le monde. Mais ce que nous disons, c’est que nous donnons les voies et les moyens aujourd’hui aux travailleurs pour empêcher les licenciements. Et, s’il y en a, qu’il y ait des réactions. Nous sommes en position offensive, et c’est ce que nous avons démontré durant les quarante-quatre jours de grève générale et avec celles qui continuent dans beaucoup d’entreprises depuis la suspension du mouvement. Notre détermination est intacte. Les salariés tiennent à leur fierté et leur dignité, il n’est pas question pour eux de revenir à la case départ, où ils étaient brimés et méprisés.
La CGTG continue son travail mais comment voit-elle son avenir au sein du LKP ?
Jean-Marie Nomertin. Le LKP est l’arme pour mener à bien notre objectif qu’il n’y ait plus d’exploitation. Le problème qui se pose aujourd’hui, c’est que nous avons une lutte que nous menons contre le patronat et le gouvernement. Notre arme, je le répète, est le LKP. La CGTG a son indépendance. Plus nous allons nous renforcer, plus le LKP sera fort. Nous avons du travail pour au minimum quatre à cinq ans. Chacun garde son indépendance. Mais ce qui est sûr, c’est qu’avec cette force et cette indépendance, nous allons affûter encore plus l’arme LKP pour obtenir les résultats que nous recherchons pour la Guadeloupe.
Un possible redémarrage de la grève ?
Jean-Marie Nomertin. Il y a les grèves qui continuent aujourd’hui, pour certaines depuis fort longtemps, mais plus crucial est l’effort à fournir pour atteindre de bons résultats. Nous allons demander à la CGT de la Martinique, à l’UGTG de la Guyane, de mener un combat commun sur les minima sociaux. Nous allons aussi contacter La Réunion, pourquoi pas pour mettre sur pied un mouvement d’ampleur. Nous allons travailler dans toutes les directions et avec tous les moyens pour obtenir des améliorations sociales et nous renforcer par rapport à nos adversaires.
Entretien réalisé par Fernand Nouvet.
| Source : L’Humanité,
Article paru le 20 avril 2009