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Publié le 6/03/2022
Meeting d’information mardi 8 mars2022 à 18h30
Publié le 6/03/2022
La Fédération d’Associations Franco-Haïtiennes de Guadeloupe (FAFHG) organise en mémoire de Anténor Firmin - Anthropologiste, journaliste, écrivain et homme politique haïtien - une soirée de partage culturel le samedi 19 septembre 2009 de 7 du soir à minuit au restaurant Big Kreyol de Beau-Soleil, Baie-Mahault. Les organisateurs entendent, par cette activité ouverte au grand public, familiariser la population guadeloupéenne avec cette figure emblématique de la littérature haïtienne.
La soirée en mémoire d’Anténor Firmin sera marquée par une table ronde qui sera animée par Jean Philippe Omotunde et l’intellectuel haïtien Louis Auguste Joint. Une conférence autour du thème : ’’ Anténor Firmin, théoricien avant-gardiste de l’égalité des races humaines. Quel apport pour le monde d’aujourd’hui ?’’, sera organisée en cette occasion.
Ces séances de débats seront entre coupées d’animations culturelles et artistiques avec pour toile de fond du slam, des chants traditionnels et de la musique compas.
Les organisateurs qui profiteront de la circonstance pour réaliser une exposition et vente d’ouvrages de l’auteur, ont également promis aux amants de la cuisine créole que l’art culinaire haïtien sera à l’honneur au cours de cette soirée.
Joseph-Anténor Firmin est né au Cap Haïtien en 1850. D’origine modeste, élève assidu et dur à la tâche, il entre dans l’enseignement à 17 ans avant de faire de la comptabilité pour le service des douanes, puis pour une maison de commerce.
En 1875, il est agent percepteur de la commune du Cap, tout en donnant des cours de grec, de latin et de français dans un établissement privé.
Il s’intéresse à la politique et particulièrement au parti libéral. C’est dans ce cadre qu’il fonde un journal au Cap, Le Messager du Nord, où il se montre déjà sensible à « la question de couleur ».
Il échoue à la députation en 1879 (d’après certains témoignages, ses adversaires font croire aux électeurs qu’il est blanc). En juin 1883, il est envoyé à Caracas par le président Salomon pour les fêtes du centenaire de Bolivar. Il refuse d’entrer dans un ministère et s’exile à Saint Thomas, puis à Paris où, soutenu par Louis-Joseph Janvier, il est reçu membre de la Société d’Anthropologie.
En 1885, Firmin publie De l’égalité des races humaines. Pour comprendre ce projet monumental, il est nécessaire d’en restituer le contexte. Entre 1853 et 1855, Gobineau a publié son tout aussi monumental Essai sur l’inégalité des races humaines, ouvrage illustrant un pessimisme romantique radical et une métaphysique raciale de l’histoire. Gobineau ne traite pas de ce qui doit être mais bien de ce qui a été, un âge d’or de l’« arianisme » et son déclin irréversible par la disparition progressive des « éléments créateurs de civilisation ». Les colonisations se déchaîneront en s’appuyant sur l’alibi de la civilisation. Or, dans ce contexte, la position d’Haïti est stratégique : l’Indépendance puis l’instauration de différents types de gouvernements montrent précisément que l’inégalité supposée des races est battue en brèche par l’existence même, dans le concert des Nations, d’une République d’anciens esclaves devenus citoyens.
L’ouvrage de Firmin est une compilation. En épuisant un à un les arguments du racisme scientifique, en montrant combien ils sont peu opératoires, tant sur un plan mythique que sur un plan scientifique, Firmin tente de ruiner les systèmes de compartimentage et de hiérarchisation des races humaines, fondées sur le volume de la boîte crânienne, la texture de la chevelure, les caractérisations phénotypiques, les répartitions linguistiques et cetera. Ce faisant, il réduit le discours scientifique de l’inégalité à un ensemble de superstitions, et met en crise la validité de ce discours. Il assigne à Haïti une place éminente dans le combat contre le préjugé et l’idéologie de la discrimination et de la hiérarchisation. Plus qu’un travail scientifique, il s’agit d’un ouvrage métacritique dans lequel Firmin prend en compte le lieu d’où il parle et d’où il écrit.
En 1888, il est en Haïti et prend part politiquement aux événements qui précipitent le départ de Salomon en 1888 (président depuis 1879) puis l’élimination du président Légitime (1888-1889) l’année suivante. Après la défense contre la raillerie raciste de l’étranger, il s’agit pour lui de dénoncer les insuffisances haïtiennes, et servir un État de telle sorte qu’il ne soit plus fondé sur les prébendes et la rapine. En 1889, Firmin est nommé par le président Hyppolite (1889-1896) ministre des Finances et des Relations extérieures. Il se distingue par ses compétences, ses pratiques et son honorabilité. Gestionnaire avisé, Firmin réorganise les administrations qu’il dirige, notamment celles des douanes et de la Banque Nationale, en diminuant les taux d’intérêt, ce qui facilite la reprise rapide des affaires, permettant notamment la régularisation du paiement mensuel des salariés de l’État.
Les recettes plus abondantes grâce à ce climat de confiance entraînent la reprise du paiement de la Dette, dont le résultat financier fut la hausse de la cote des obligations à la bourse de Paris. Firmin réussit même ce tour de force en Haïti d’obtenir une trésorerie bénéficiaire. Jamais les finances de l’État n’auront été plus prospères.
Fort de ses ressources, le pays verra un développement inégalé des travaux publics sous la présidence d’Hyppolite : ponts, éclairage public, arrivée du câble transatlantique à Port-au-Prince, téléphone dans les grandes villes, marchés. Pendant les deux années de son ministère, Firmin parvient à mener de façon subtile les négociations concernant la location du Môle Saint Nicolas avec les représentants politique et militaire des États-Unis en Haïti : Frederick Douglass, ambassadeur, figure emblématique de la lutte contre le préjugé de couleur et partisan de l’annexion d’Haïti, ainsi que l’amiral Gherardi. Firmin quitte le cabinet en 1891 et se retire en France, pendant qu’en Haïti on assiste à un durcissement du régime. Ce ministère laisse le souvenir d’une intelligence politique, faite de civisme exceptionnel et de probité administrative, un ensemble de pratiques qui constituent le firminisme.
Anténor Firmin publie à Paris en 1891 Haïti au point de vue politique, administratif et économique, texte d’une conférence et, en 1892, Une défense, plaquette qui est une réfutation des critiques émises par son successeur aux finances.
Il rentre en Haïti en 1893, et, lors de sa rencontre avec le cubain en exil, José Martí, évoque le projet de « confédération antilléenne ». À Paris peu après, Firmin multiplie les contacts avec les milieux latino-américains, et s’intéresse de près à la question du panafricanisme. À l’avènement du président Sam en 1896, Firmin redevient ministre des Finances et des Relations extérieures, mais le Cabinet est renversé après un vote de la Chambre. C’est un nouveau départ pour l’exil.
Firmin publie en 1898 Diplomate et diplomatie, qui concerne le traitement de l’affaire Lüders, qu’il compare à celui de l’affaire du Môle : alors que Firmin est parvenu à préserver l’intégrité du territoire national, le gouvernement de Sam cède face l’ultimatum de deux canonnières allemandes qui exigent une indemnité de 2000$ et une lettre d’excuse, alors que Lüders, commerçant allemand condamné pour avoir brutalisé un policier haïtien, avait été gracié et autorisé à quitter le territoire. Cette affaire eut un retentissement considérable sur le plan international : elle témoigne de la faiblesse de l’État haïtien dans un contexte où les menées impérialistes des puissances européennes sont particulièrement vives.
En 1900, il est nommé ministre plénipotentiaire à Paris. Il rentre en Haïti en 1902, au moment de la chute du président Sam. Ses partisans, appuyés par le général Nord Alexis et l’amiral Killick, entrent dans le gouvernement provisoire dirigé par Adolphe Boisrond-Canal. Firmin se prépare alors à l’élection présidentielle. Mais les propres ambitions de Nord Alexis le poussent à se retourner brutalement contre les firministes et à déclencher une sanglante guerre civile. Boisrond-Canal se range au côté de Nord-Alexis, dénonce Killick au gouvernement des États-Unis comme insurgé et son navire, le Crête-à-Pierrot comme « pirate ». Après l’incendie de Petit-Goâve, les navires américains empêchent Killick d’appuyer les firministes.
Firmin lui-même est l’objet de pressions internationales – notamment de l’association pan-africaine – pour se retirer de ce processus révolutionnaire, en faveur d’une intervention américaine. Enfin, le soutien allemand au gouvernement provisoire, résolument opposé à Firmin depuis l’affaire Lüders, se marque par la tentative de se saisir de Killick, qui choisit de saborder le Crête-à-Pierrot et de couler avec lui. Cette perte porte un coup fatal aux partisans de Firmin, qui est forcé de négocier. Il repart en exil en octobre 1902.
La situation économique se dégrade dangereusement : pour masquer les insuffisances de gestion, le président Nord Alexis (1902-1908) entraîne l’économie haïtienne dans une inflation importante et prône un discours ouvertement xénophobe, attribuant tous les malheurs d’Haïti à la présence étrangère. En 1904, année du Centenaire de l’Indépendance, la gourde n’a quasiment plus aucune valeur. Cette situation laisse percevoir le danger imminent d’une invasion états-unienne : en 1898, Hawaï est annexée ; Cuba et Porto Rico sont mis sous tutelle à la fin de la guerre hispano-américaine.
Les pressions française et allemande sur Haïti s’accentuent notablement et font régulièrement perdre la face au gouvernement haïtien : à plusieurs reprises et à la suite d’incidents diplomatiques, leurs navires de guerre menacent directement la ville de Port-au-Prince d’un bombardement. Pour contrer d’éventuelles insurrections, Nord Alexis instaure un régime de terreur, particulièrement sur les populations les plus pauvres.
Firmin publie un programme politique en 1905, Monsieur Roosevelt, président des États-Unis, et la République d’Haïti. Il y pose « les conditions pratiques qui doivent permettre à Haïti de faire preuve de l’aptitude de la race noire à constituer une société politique harmonieuse » (647). Il préconise un rapprochement entre Haïti et les États-Unis, brosse des tableaux comparés de l’histoire des deux pays, et insiste sur certains aspects du mal haïtien : le fonctionnement despotique des institutions, le manque de formation politique des élites, la gestion calamiteuse des finances publiques qui confine à l’économie de rapine. Il propose des réformes administratives en vue d’assurer le développement économique et surtout social du pays : il y exprime la doctrine d’un libéralisme résolument démocratique.
On extrait souvent une phrase célèbre de ce livre : « Dans tous les pays, dans toutes les races, le progrès ne s’effectue, ne devient tangible que lorsque les couches sociales inférieures, qui forment toujours la majorité, tendent à monter en intelligence, en puissance, en dignité et en bien-être. Là où la politique, dite éclairée, ne consiste qu’à perpétuer l’infériorité de ces couches, formant l’assise même de la nation, en exploitant leur ignorance, il n’y a point de progrès possible... ».
En janvier 1908, ses partisans pensant qu’ils seraient appuyés par les États-Unis, tentent un coup de force aux Gonaïves, qui est rapidement écrasé, faute de l’aide américaine. Le gouvernement américain redoute en effet une extension de cette insurrection à la République Dominicaine et à Cuba. Les chefs de l’insurrection sont fusillés. Parmi eux, les frères Coicou. La décision américaine s’accompagne d’une mise en garde aux représentations européennes. Désormais, l’État américain est nettement plus impliqué dans la politique haïtienne que n’importe quelle autre puissance. Mais en même temps, il n’intervient absolument pas lors du durcissement du régime, notamment lorsque celui-ci fait donner la troupe contre les paysans souffrant de famine (1908).
La chute de Nord Alexis puis l’élection à la présidence d’Antoine Simon (1908-1911) ne permettent pas à Firmin de reprendre une carrière politique. Il est envoyé ministre à La Havane, puis à Londres, tant le président Simon craint que cet intellectuel et rival potentiel ne soit trop près. Firmin ne rentrera plus en Haïti. Il s’installe à Saint Thomas, d’où il publie Les lettres de Saint Thomas dans lesquelles il met en perspective la construction toujours à réaliser de la démocratie haïtienne dans un ensemble plus vaste, une confédération des Antilles.
En 1911, il publie une réflexion testamentaire et prophétique sur l’état d’Haïti, au titre évocateur : L’Effort dans le mal : « Homme, je puis disparaître, sans voir poindre à l’horizon national l’aurore d’un jour meilleur. Cependant, même après ma mort, il faudra de deux choses l’une : ou Haïti passe sous une domination étrangère, ou elle adopte résolument les principes au nom desquels j’ai toujours lutté et combattu. Car, au XXe siècle, et dans l’hémisphère occidental, aucun peuple ne peut vivre indéfiniment sous la tyrannie, dans l’injustice, l’ignorance et la misère ». Firmin meurt la même année (1911). En 1915, les troupes états-uniennes débarquent en Haïti.
Yves Chemla
Source : http://www.lehman.cuny.edu/ile.en.ile/paroles/firmin.html
Réaction de Christine C l G le 18 septembre 2009 @ 08h47
Il est incroyable que certains aient pu penser que la couleur de la peau pouvait être un empêchement à l’accès aux mêmes compétences .
On hallucine !