KONFERANS, LYANNAJ é MEETING èvè Lé REZISTAN - Jeudi 27 Juin 2024
Publié le 24/06/2024
Meeting Solidarité KANAKY mardi 11 juin 2024
Publié le 10/06/2024
Meeting lundi 06/02/2023 à 19h au Palais de la Mutualité
Publié le 5/02/2023
Meeting d’information jeudi 10 mars 2022 à 18h30
Publié le 6/03/2022
Meeting d’information mardi 8 mars2022 à 18h30
Publié le 6/03/2022
Appel de l’Avant.
Encore pour quelques heures, nous sommes dans le temps de l’Avant.
Les enjeux sont importants. Sauf à vouloir le désordre, nous ne pouvons plus nous permettre de renoncer aux fondements actuels de notre paix sociale.
La grève générale du début 2009 n’avait été suspendue que grâce à la signature de l’accord général du 04 mars. Son article 165 prévoit la tenue régulière d’un Comité de Suivi.
Celui-ci est d’autant plus nécessaire qu’à l’évidence de nombreux engagements n’ont tout simplement pas été respectés tandis que d’autres ont été délibérément biaisés. Ne serait-ce que pour rapprocher les positions des protagonistes, il y a nécessairement matière à plusieurs réunions du fameux Comité de Suivi.
Le refus du dialogue exprimé par le gouvernement et les Présidents de Collectivités majeures, au prétexte fallacieux que tout serait réglé, ne peut manquer d’interpeller chaque démocrate.
Gardons en mémoire qu’en décembre 2008, la protestation s’était organisée initialement autour du refus de la vie chère et de la baisse du pouvoir d’achat. Près de deux ans après, il y aurait tant à dire
sur le dossier du prix des carburants, sur celui du prix des produits essentiels, sur le prix des loyers, sur le prix de l’eau, sur les 200 euros …
Chacun sait que les mêmes causes sont susceptibles de produire les mêmes effets.
Refuser d’honorer sa signature et refuser le dialogue qui a été demandé pacifiquement, encore le 26 octobre dernier, et qui continue de l’être par des dizaines de milliers de personnes équivaut à nier
une authentique expression démocratique. Cela revient à ne laisser à ces dizaines de milliers d’électeurs désabusés que leurs chants dans la rue comme mode de revendication ! Tous ces hommes en mouvement sont bel et bien en Liyannaj : chaque homme mille voix, mille pas, mille
chants, mille consciences éveillées. Simultanément, de son côté, le représentant de l’Etat a bien pris soin de proclamer qu’il s’attachera à faire respecter l’ordre public et la liberté de circulation.
Autrement dit, une seule provocation, juste une, lui suffira pour déclencher la répression par les forces armées.
De toute évidence, ce n’est pas le mode de traitement d’une crise sociale majeure que l’on retient ordinairement dans l’hexagone. Les médias nous le prouvent sans cesse : bien qu’elles soient autrement plus radicales qu’en Guadeloupe, les actions populaires qui sont conduites sporadiquement dans l’hexagone ne sont jamais criminalisées mais déclenchent même la compassion des politiques, des ministres et des préfets.
Pour autant, nous ne pouvons nier l’existence de certaines similitudes. L’une d’elles est particulièrement choquante : que l’on puisse condamner à 1.000 € d’amende des syndicalistes pour avoir refusé de se soumettre à un prélèvement ADN, par le même jugement qui les relaxe de l’affaire principale qui les avait conduits devant les tribunaux. Par cette loi, les syndicalistes peuvent être inscrits dans un fichier national d’empreintes ADN, au même titre que des délinquants sexuels - la délinquance en col blanc n’étant pas concernée !
De passage au début de ce mois en Guadeloupe, une délégation de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité (HALDE) a rappelé qu’en France hexagonale le premier critère de
discrimination est la nationalité. Elle a surtout observé qu’en Guadeloupe l’appartenance syndicale constitue la première cause de discrimination. De fait, cette discrimination, cette répression qui ne
veut pas dire son nom, frappe actuellement les membres des principaux syndicats qui animent le LKP.
Comment accepter que quelques-uns soient désignés comme boucs-émissaires de toutes les protestations émises par des dizaines de milliers de guadeloupéens ?
Au sortir de la seconde guerre mondiale, l’Ecole Nationale d’Administration a été créée afin que les hauts fonctionnaires de la République ne soient plus les fossoyeurs de leur population ni surtout de leur propre humanité. Ainsi, quand au sommet de l’exécutif le pouvoir devient fou, lorsque la démocratie est menacée, pour l’intérêt général, les hauts fonctionnaires doivent faire preuve de discernement et refuser de servir aveuglément. En créant l’ENA, le Peuple français a voulu que son administration ne soit plus jamais le relais, l’instrument, d’une doctrine aussi horrible que le nazisme.
Après avoir réchappé à une expérience aussi traumatisante, un Peuple serait bien mal venu de faire supporter à un Autre ce qui l’a tant fait souffrir. Se pourrait-il que les valeurs qui président à l’administration française hexagonale soient l’exact opposé de celles qui président à l’administration française outre-mer ? Ce serait terrible … le signe d’une décadence de civilisation qui ne pourrait que conduire à une remise en cause radicale de l’ordre social et institutionnel actuel.
En tout état de cause, l’Histoire réserve parfois des paradoxes saisissants. Du creuset de la souffrance la plus profonde (engendrée par exemple par le nazisme ou par l’esclavage) peuvent émerger les plus terribles des bourreaux mais aussi les plus magnifiques apports à l’humanité.
Aujourd’hui, partout à travers le monde s’organisent des marches populaires qui prennent souvent la forme de grèves générales contre la pwofitasyon, dans le droit fil des 44 jours de Guadeloupe. Ainsi,
quand il a initié ses marches en 2009, notre Peuple ne savait pas encore qu’il commençait à marcher pour la Planète !
Comme d’autres avant moi, je tiens à lancer un appel au dialogue et à la raison de tous ceux qui doivent normalement être engagés par la signature qu’ils ont placée au bas de l’Accord Général du 04 mars 2009.
Que mon appel soit aussi une exhortation au respect du syndicalisme qui constitue un contre-pouvoir indispensable à toute démocratie.
En ce qui me concerne, le 14 décembre prochain je serai aux côtés de mes camarades des 44 jours pour réclamer une nouvelle fois la tenue du Comité de Suivi.
Fait à Pointe-à-Pitre le 13 décembre 2010.
Philippe VERDOL [1]
Maître de Conférences en Economie
Campus de Fouillole - UAG.
[1] Coordinateur de l’ouvrage "LKP. Ce que nous sommes" (Editions MENAIBUC)