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L’air de la liberté des grévistes, l’aire du pouvoir des employeurs
À l’occasion du mouvement du 19 mars 2009, des salarié-e-s d’un Leclerc, sans expérience, se retrouvent dans une atmosphère festive dans les locaux de l’UL CGT de Tarbes. Le lendemain, en première page du quotidien local, figure une photo de leur banderole qui détournait un slogan publicitaire de la marque. Les patrons du groupe franchisé savent que les licenciements pour fait de grève sont nuls. Deux mois plus tard, trois « meneurs », employé-e-s de « l’espace culturel », sont licencié-e-s pour motif économique. Trop de coïncidences tuent le hasard : ils ont été identifiés comme porteurs de la banderole. Les trois lettres de licenciement sont rédigées dans les mêmes termes : « Détérioration des conditions économiques du magasin ; confirmation de la dégradation du chiffre d’affaires réalisé au début de l’année 2009 ; réorganisation du magasin exigeant la suppression de trois postes pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise. »
Pour moi, le droit du travail s’architecture autour de trois piliers : l’aire, le rythme, la chanson. En constatant le tour de passe-passe de l’employeur, les prud’hommes prononcent la nullité des licenciements. Le motif économique des licenciements masque la véritable cause d’une rupture pour fait de grève. La décision du conseil de prud’hommes [1] reflète cette construction autour des trois piliers que la direction du groupe avait cru pouvoir contourner.
L’aire : c’est le champ d’application des règles de droit au sein de l’entreprise. Les juges disent : « La situation économique du seul espace culturel, quelle que soit l’aire d’activité de cet espace, permet d’écarter les arguments de l’employeur » et ce d’autant que les tableaux justificatifs de ses difficultés « ne prennent pas en compte la situation économique du groupe, seule aire d’appréciation des difficultés alléguées. »
Le rythme, c’est le temps utile qui s’impose à l’employeur pour que ses décisions soient régulières et licites. Ici, les juges ont examiné la durée des difficultés invoquées par l’employeur. Ils constatent alors qu’elles ne sont pas « nouvelles, puisque (ce dernier) fait remonter le phénomène au début 2000 » alors que la réorganisation « doit être indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise ou du secteur d’activité auquel elle appartient ».
La chanson : ici, c’est l’air du droit et des libertés des travailleurs. Qu’en disent les juges ? « Les salariés présentent des faits laissant supposer l’existence d’une discrimination, directe ou indirecte, en raison de leurs activités syndicales et de leur participation à un mouvement de grève » et, constatant que l’employeur « n’a pas démontré que les licenciements étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination », le conseil les a annulés avec toutes les conséquences de droit. Il ajoute, en leur accordant des dommages et intérêts, qu’« il faut ici rappeler que les salariés demandeurs exerçaient leurs droits civiques reconnus par la Constitution (...), droits que l’employeur avait l’intention manifeste de bafouer ». Bien jugé, non ?
Par Tiennot Grumbach, avocat.
Source : L’Humanité - 26.09.2011
[1] CPH Tarbes, 19 09 2011 n° 09/00347. Pauline Le Bourgeois, avocate à Toulouse. Décision rendue en départage, non définitive, susceptible d’un recours devant la cour d’appel de Pau.